vendredi 23 septembre 2011

Mexique, suite et fin

Après avoir rechargé nos piles autant que possible à Ixtapa, nous étions tous prêts à reprendre la route.  Ariel, entre autres, commençait à être fiévreux,  et semblait épuisé : il avait mal dormi à l’hôtel.  Déjà après une journée dans Bertha, il semblait déjà plus reposé.   Le pauvre semblait s’ennuyer de sa maison !  Au point de s’en rendre malade !  C’est incroyable de se rendre compte que pour Ariel, sa maison, c’est Bertha, lui enlever ce repère, c’est pour lui très déstabilisant… faudra s’en souvenir…

Premier arrêt : Acapulco.  Ce n’était pas ce à quoi je m’attendais.  Bien sûr, il y a des gros hôtels et ça semble être particulièrement l’endroit pour le « nightlife », mais c’est surtout un site exceptionnel.  Une baie merveilleuse qui rend les vagues du Pacifique moins monstrueuses, entourée de montagnes luxuriantes, du sable blanc… franchement, ce n’est pas surprenant qu’un tel site de carte postale soit devenu une ville si touristique…  Mais bon, on passera quand même tout droit pour s’arrêter dans la baie suivante : Puerto Marqués, petit village de locaux qui tente tant bien que mal de vivre des miettes de sa géante voisine.  Ils n’auront malheureusement pas grand miettes de nous, qu’un plateau de fruit acheté à une dame qui n’espérait que retourner chez elle. Nous stationnons dans la rue, à un lancer de pierre de la mer où nous nous baignons dans une mer calme pour la première fois depuis longtemps…  Les garçons s’en donnent à cœur joie.  Le lendemain, baignade avec le lever du soleil derrière les montagnes avant de partir pour Puerto Escondido.

On y arrive tôt : dix heures ! et on y passe toute la journée !  Puerto Escondido est reconnu pour ses vagues dangereuses et son surf ! On élira domicile sur la baie la plus pépère de toute la région !  C’est exactement ce qu’il nous fallait !  Les gars, les trois, feront du surf (body surf) pendant une partie de la journée, (bon d’accord, faut avouer que Ariel a été davantage aidé par papa que les deux autres).  On y rencontrera également Chris et Emma.  Chris a les cheveux naturellement platine, impossible de ne pas le remarquer, il dit lui-même à son sujet qu’il est un dollar sur pattes en Amérique latine, où tous sont si foncés.  Il vient de Vancouver, parle un très bon français, en plus d’un très bon espagnol et d’un très bon portugais, il passe la moitié de sa vie à voyager et est évidemment à Puerto Escondido pour le surf !  Emma vient de Barcelone et a rencontré Chris à Vancouver où elle vit depuis un an car elle voulait apprendre l’anglais, ce qu’elle a d’ailleurs fort bien réussi.  Ils se dirigent vers le sud comme nous et on leur propose de les héberger pour un temps dans Bertha, ce qu’ils acceptent  de bon cœur.   Nos trois gars les adopteront immédiatement. Emma, en particulier est la nouvelle flamme de nos trois jouvenceaux, comme  s’il manquait d’œstrogène dans notre équipe de quatre gars-une fille...  Bref, c’est à savoir qui s’assoit à côté d’Emma, à qui Emma coupera sa viande, qui pourra jouer aux autos avec Emma…  C’est particulièrement drôle de voir Élias lui parler en français comme si rien n’était et elle lui répondre en Espagnol, bien qu’elle ne comprenne pas un traître mot de français !  Bref, Chris et Emma sont super sympathiques et nos trois gars sont charmés.
 








Le lendemain, on dort à Barra de la Cruz  (bonne chance pour trouver cette ville sur une carte (vas-y Francis !).  Le soir, on doit quitter la plage, camping interdit.  Oups, crevaison…   Tant bien que mal, je tente de changer le pneu… J’ai perdu mon tournevis il y a quelque temps, mais un gentil américain m’en prête un, mais ma croix pour desserer les botes s’avère inutilisable, je tourne dans le vide, moi qui croyait que cet outil était incassable !  Rien n’est incassable, j’aurais dû le savoir, j’ai trois gars après tout.  On en sera quitte pour quitter la plage et remonter au village avec notre crevaison, en attendant le lendemain matin.

Le lendemain, avec l’aide de Chris et de gentils touristes américains (d’autres, pas les mêmes) qui me prêtent leurs outils, je finis par réussir.  On laissera Kris et Emma à Salina Cruz, et après avoir fait réparer le pneu et acheter les outils, on poursuit notre route.  On s’arrête sous un pont, sur les berges d’une superbe rivière, on y passe la nuit.  Dire qu’on nous avait averti de ne pas coucher n’importe où au Mexique…   Il y a comme un petit goût de Canada ( des belles rivières, s’arrêter n’importe où) qui me manquait.
Avec Kris et Emma
L’arrivée à San Cristobal las Casas, le lendemain, se fait dans la douleur.  La saison des pluies frappe fort, ça ressemble à peu de choses près à une inondation, en plus des rues super étroites dans un centre-ville qui s’étend, s’étend, s’étend.  On accroche Bertha, on peaufine encore notre inventaire de sacres, en tentant de garder la plus grande partie intérieure (nous voyageons avec des enfants, tout de même !).  On réussit quand même à se stationner en plein centre-ville.  Ouf… Une fois l’émotion passée, San Cristobal s’avère de toute beauté.  Le retour chez les mayas est pour moi accueilli avec un sourire.  Les habits traditionnels, les enfants de sept ans (quand ce n’est pas plus jeune) qui vendent des bracelets ou de la gomme à mâcher… tout rappelle ici le Guatemala, c’est un avant-goût bien agréable de ce que nous verrons dans quelques semaines…

Et qui rencontrons-nous le lendemain au coin d’une rue : Kris et Emma !  On est fort heureux de les revoir. Salina de la Cruz était affreuse, ils ne sont pas restés.  De notre côté on avait retrouvé leur argent, une carte de banque, des sous-vêtements, des gougounes, on était dus pour se revoir…  Bref si on s’était demandé si l’histoire du pneu les avait découragé de nous…  il semble que non, car ils acceptent notre invitation pour se rendre à Palenque le lendemain. Ils ont la couenne dure, et semble nous trouver sympathiques et c’est réciproque. C’est comme s’il sentait que leur immersion culturelle dans une famille de fous sur la route n’était pas tout à fait terminée...  On passe la soirée ensemble, c’est la fête de l’indépendance et toute la ville est en fête… les gars jubilent : ils n’ont pas fini de nous reparler des princesses mexicaines avec leur robes qui tournent : (entendre danses folkloriques mexicaines).  On s’endort heureux. Mais les mexicains sont en fête et borrachos : ils passent leur nuit à cogner à la porte de notre Bertha en se trouvant très drôles, vous comprenez la bonne nuit passée...

Le lendemain, on roule sur une des pires routes   qu’il m’ait été donné de rouler :
Départ à 9 :00
Arrivée à 17 :30
Nombre de kilomètres : 230
Dénivellé total : 3000 mètres

Et c’est sans compter tous les villages où nous sommes passés et tous les topes. ( ?)  Quoi ? vous ne connaissez pas les topes ?  Les topes sont des dos d’ânes mexicains. Les topes ont réussi à soutirer plus de jurons à Christine et à moi qu’en toutes les autres occasions réunies.   Les topes sont des toutes les grosseurs possibles (c’est à chaque fois une surprise !) et sont parfois annoncés (entendre que parfois ils ne le sont pas du tout et qu’il faut les deviner).
 
Bref, on arrive fourbus, mais le camping mayabel à Palenque est superbe : énorme piscine, resto, drinks, toute le kit, pour un prix raisonnable,  et à deux pas des ruines.  Le lendemain, la visite des ruines n’est pas un franc succès, les gars semblent se demander pourquoi on trouve des tas de roches si intéressants, et il fait très chaud…  Préparation mentale des trois gars à peaufiner pour papa-maman…

















Cathédrale de Campeche



Départ le lendemain, au revoir à Kris et Emma, vous resterez longtemps dans nos coeurs et arrivée  à Campeche, très jolie ville  fortifiée (contre les pirates !) et toute peinte en  couleurs pastels !  Mais elle semble morte, toute la ville semble être en lendemain de veille… Pour donner une idée, on se croirait un 26 décembre avant l’invention du boxing day (eh oui, s’il y a des jeunes lecteurs, sachez que le boxing day n’a pas toujours  existé !). 














Arrêt ensuite à Izamal, ville un peu à l’écart des grands circuits touristiques et ça nous fait du bien.  Cette ville aux mille arches  (seul le Vatican a plus d’arches dans une même ville, paraît-il) est magnifique et tranquille ! La lumière est incroyable, le bleu du ciel, le blanc et le jaune des maisons font tout un effet.  L’ambiance est ici complètement différente, on est au Yucatan, c’est l’ambiance des Caraïbes.  On est arrivés ici en pleine sieste et tranquillement la place s’est remplie d’écoliers, de badauds, de gens venus chercher un peu d’ombre.  Certains s’assoient sur la place à quatre heures, et le lendemain matin à sept heures, ils ne semblent pas avoir bougé de leur banc. L’ambiance fait ici penser à Cuba…   On soupera le soir dans un excellent restaurant et la cuisine du Yucatan est délicieuse, et bien différente du reste du pays !  Bref à tous points de vue, Izamal est une très belle surprise.

 














Tour de calèche à Izamal



























Le lendemain, on visite Chitchen-Itza, et on ne refait pas la même erreur qu’à Palenque : à huit heures tapantes, on est sur le site, avant les touristes et avant la chaleur.  Même sous la chaleur, les gars s’en sortent bien ils sont particulièrement impressionnés par les iguanes qui se font chauffer au soleil sur le site.  Moi et Christine, c’est plus le site que les iguanes qui nous impressionne : grandiose !


À Tulum, sous les conseils de nos prédécesseurs en camping-car, on s’installe sur la playa maya.  Le blanc du sable, le bleu du ciel, le turquoise de l’eau : vive les caraïbes !  Le soir, comme on vient de coucher les trois enfants, deux policiers viennent nous voir et nous disent que l’on ne peut camper sur la plage.  On tente de leur expliquer qu’un premier policier est venu nous voir il y a deux heures et que tout était parfait, que des amis sont venus dormir ici il y a quelques mois, rien à faire.  On tente d’expliquer qu’on a fait  environ 10 kilomètres de côte à Tulum et qu’il n’y avait aucune place pour un camion comme le nôtre.  Rien à faire : on est quitte pour changer de place.  Ils nous disent qu’à cent mètres sur la route principale, on pourra camper.  On y va, on va voir au restaurant, et il n’y a pas de problèmes pour eux.  Le voisin vient nous voir et nous dit qu’on a pas le droit de se stationner dans la rue, qu’il faut aller chez lui et payer pour se stationner.  Ouin, côté hospitalité on repassera…  je lui dis que depuis sept semaines on se stationne dans la rue au Mexique.  Quelques minutes plus tard, des policiers reviennent, alertés par le voisin si hospitalier…  ils me disent que je n’ai pas le droit de me stationner dans la rue, que je bloque un accès public.  Je leur dis qu’il y a au moins 8 mètres de large pour passer, ce qui est vrai d’ailleurs.  Ils disent qu’on n’a pas le droit de dormir ici, je leur dis que tout ce dont j’ai besoin, c’est d’un stationnement,  que j’ai dormi dans la rue depuis sept semaines que je suis au Mexique.  Ils disent qu’ici à Tulum, c’est interdit, on ne peut dormir dans son  camion, s’il est stationné dans la rue…  Je n’aurai pas raison avec eux, même si leurs règlements n’ont aucun sens, nous aurions eu le droit de se stationner à cet endroit, seulement si nous n’y passions pas la nuit ! Il faut changer de place encore, il est rendu dix heures, je la trouve de moins en moins drôle.  On choisi cette fois une station d’essence.  Et que voit-on sur l’accotement de la route ? Trois dix roues stationnés à la queue-leu-leu, leur conducteur dormant tranquillement.  Vive la loi à géométrie variable !  Ce qu’il faut en comprendre, c’est que nous ne sommes pas les bienvenus ici, à la Riviera maya, entre Cancun et Tulum.  Nous sommes louches. Les touristes qu’ils recherchent, ils sont riches et tous prêts à payer le gros prix.  Get Out les hippies !  Avec notre camper peinturé avec des fleurs, on est carrément indésirable…  Ça fait longtemps que je ne m'étais pas si senti aussi à la mauvaise place…
Plage à Tulum

Le lendemain, on ira quand même à Akumal.  On y nage avec les tortues, les deux grands font de l’apnée pendant près de deux heures.  Moi et Christine on n’en revient pas nous-mêmes !  Jamais on ne les en aurait crû capables !  Et à quelques  cent mètres du bord, on est sur un récif de corail !  C’est la première fois que je vois autant de poissons !  Élias s’y rendra aussi avec Christine et y plongera une autre heure !  Voir mes deux grands plonger ainsi entre décidément dans la catégorie des choses que  je n’aurais pas crû possible.

Ariel est encore petit pour la plongée...


















 Coucher à Majahual, loin de la riviera maya, où nous sommes redevenus les bienvenus…  Luis, le propriétaire des cabanas où nous nous sommes arrêtés,  prépare des noix de coco aux enfants et devient leur nouvel héros : ils passeront une partie  de l’après-midi à donner des coups de machette (bâton) sur des noix de coco.  Farniente pour tout le monde. 












Quand on repartira, ce sera pour le Bélize… Au revoir Mexique!


mercredi 14 septembre 2011

La culture, c'est comme la confiture

Ma mère dirait la culture, c’est comme la confiture, moins t’en as, plus tu l’étends.  Je veux pas ici passer pour une famille d’analphabètes aculturés, ceux qui nous connaissent un brin ne nous croiraient pas…  Seulement, avec trois jeunes enfants, nous ne nous attendions pas vraiment à découvrir la « culture » avec un grand C.



En sortant du traversier nous menant de La Paz à Mazatlan, on était tous crevés.  La traversée en bateau avait d’abord été excitante pour les gars, mais finalement longue et épuisante, une fois l’excitation passée.  La petite chambre, (trois lits simples), les courants d’air chauds et froids, l’air de la mer humide et même pas rafraîchissant, les premiers contacts avec la bouffe mexicaine de peu de qualité : on était contents de retrouver le plancher des vaches.  On ne restera pas à Mazatlan, trop de bruit et trop de gens pour notre état de fatigue.  On roulera jusqu’à Teacapan, un petit paradis (aux dires du guide de voyage) où l’on retrouve plus de manguiers que nul part ailleurs au Mexique, en plus des cocotiers, palmiers.  La verdure est de retour.  Ça fait du bien.  Après plus d’une semaine, le désert commençait à nous épuiser.  On cherche une plage et on finit par trouver un RV park collé sur un restaurant.  Génial !  En tentant de se stationner sur une des dalles de béton conçues exactement pour nous, Bertha s’arrête.  Je sors, regarde sous le camion… Merde ! Les dalles de béton sont plus petites que notre Bertha, qui a maintenant le ventre  écrasé sur ladite dalle et les quatre roues entre ciel et terre.  Les Mexicains n’ont pas compris les dimensions des VR et moi je n’ai pas encore compris les dimensions de ma Bertha…  Après une bonne quinzaine de minutes de sacrage intérieur (il faut montrer le bon exemple aux enfants !), je sors le jack et je réussis à lever suffisamment les roues avant pour que les roues arrières touchent le sol, et Christine nous sort du trou.  Ouf, on s’est sauvé un nouveau tracteur…



Une fois les sueurs froides passées, nous rencontrons Luis et son amoureuse venus passer les vacances dans la région.  Luis est pilote d’avion, il vit à Mexico, a étudié aux Etats-Unis et parle un Anglais comme on n’en rencontre pas au Mexique.  Mais je suis plus surpris encore  lorsqu’il sort son français !  Il parle couramment français, pour avoir vécu jusqu’à l’âge de huit ans en France. Mais les enfants sont moins surpris par sa maîtrise de ces trois langues et sa gentillesse que par ses talents de pêcheur.  Les deux pieds dans l’eau, il sort des petits poissons avec seulement un fil, un plomb, un hameçon et des crevettes, attachées à une bouteille de coke !  Élias et Théo pêchent chacun leur premier poisson, qu’on se réserve pour  le lendemain.  Comble de gentillesse, Luis nous donne sa ligne à pêche en nous souhaitant bon voyage (je sais, le terme est excessif pour une bouteille de coke, mais faute de mieux…).




Bivouac à Tecapan

















Mais le paradis décrit par le petit futé s’avère être aussi le paradis des moustiques,  ils se régaleront aux dépens d’Élias, de Théo et de Christine.  Je ne sais par quel miracle, moi et Ariel serons presque épargnés.  Le lendemain, on se paye le restaurant d’à côté et on profite de la piscine pendant une bonne partie de l’après-midi.  Lorsque Christine entre dans Bertha, à trois heures, elle n’en ressortira plus jusqu’à notre départ, le lendemain.  Décidément, les moustiques ont eu raison d’elle.  Les deux grands l’imiteront.  Il ne reste que moi et Ariel qui jouent dehors…Décidément, on ne restera pas plus de deux nuits dans ce paradis du maringouin.  Durant la nuit, un orage nous tombe dessus et le lendemain, on comprend enfin ce que veut dire « saison des pluies ».  Le terrain est inondé, vingt centimètres d’eau recouvre tout le Rv Park !  Vite, il faut qu’on sacre le camp ! Je suis nerveux, Bertha n’est pas un amphibus et je ne sais pas comment nos cinq tonnes réagiront dans l’eau.  Finalement, Bertha fait ça comme une championne, mais à un tournant, une tasse d’eau me tombe sur la tête…  Il y aura un petit travail de coaking à faire, mon réparateur-débosseleur-soudeur a dû tourner les coins ronds de ce côté…  Sur notre chemin, on voit des routes entières transformées en rivières : deux pieds d’eau ont envahi certaines rues, à un tournant, sur un chantier, on voit même une pelle mécanique dont les chenilles au complet sont sous l’eau !  Adieu la côte inondée, adieu moustiques : direction les montagnes. 

On s’arrête à Tequila, d’où vient le nom de la fameuse boisson, passage presque obligé pour quelqu’un dans mon genre.  Le soir, il y a une fête au village et les gars s’en donnent à cœur joie.  La musique est quétaine comme seuls les latinos sont capables de l’être et les garçons adorent !  On aura même droit à une démonstration de danse contemporaine avec crochets à la québécoise, grand spécial Élias et Théo, sur la place de Tequila.  Ariel, de son côté, fait les yeux doux à toutes les Mexicaines qu’il rencontre qui ont une assiette avec un morceau de gâteau, et toutes partagent avec lui.  Décidément, nos trois mousses ne passent pas inaperçus… On se couche plus tard qu’à l’habitude, bourrés de gâteaux, et heureux.  


La place de Tequila

Le lendemain, passage obligé, on visite une plantation d’agave bleue (fruit à partir duquel est faite la Tequila).  C’est une genre d’aloès géante dont on cuit le cœur qui ressemble à un ananas géant (on fait à peine le tour avec nos bras et il peut peser jusqu’à 80 kilos !) pour ensuite l’écraser pour en recueillir le jus qui est distillé par la suite.  Les gars ont sans doute préféré l’étang aux canards qu’il y avait sur la plantation, mais bon…  il est un peu normal (et presque rassurant !) que la production d’alcool ne soit pas le premier intérêt d’enfants de un, trois et cinq ans.
Agaves, avec lesquelles on fabrique la tequila
Prochaine étape : Guadalajarra. Ville de culture et mégacentre urbain, deuxième ville la plus peuplée du Mexique après Mexico DF.  Un défi pour les conducteurs de Bertha…  Notre périple en ville faillit se terminer en guerre nucléaire : les enfants ont chaud, crient, se battent, sont fatigués, Christine et moi avons les nerfs à vifs.  Les rues du centro sont affreusement étroites, des voitures partout, la conduite des Mexicains est archi-stressante (pour dire le moins).  On avait espéré se trouver un stationnement payant au Centro, mais voilà : tous les stationnements sont couverts (eh ! c’est ça dans un pays de soleil !) et les toits trop bas pour notre Bertha.  Il est interdit de stationner partout même si des Mexicains sont stationnés partout (ce qui inclut évidemment où c’est interdit).  Et nos fibres anglos-saxonnes qui respectent les règlements ne sont pas (encore) capable de les enfreindre. L’horreur, il faut se relayer au volant au centre-ville pour que nos nerfs ne flanchent pas…  On trouve finalement un stationnement loin du centre dans une petite rue tranquille…  En plein quartier universitaire.



On réussit finalement à désamorcer la bombe atomique qui faisait tic et tac, à coups d’autobus mexicains pour se rendre au Centro (où je me paye le luxe d’engueuler le chauffeur qui voulait nous charger le double du prix !), et grâce aux promesses de Christine  de voir de belles fontaines…  Ça deviendra peu à peu un passage obligé dans toutes les villes suivantes : les fontaines !  Le coup est bien monté par Christine, les fontaines sont sur les places du village, où l’on retrouve bijoux architecturaux et toute la vie des marchés publics : bref, c’est là qu’il faut être et c’est là que les gars veulent être !  La Plaza de Armas de Guadalajara est particulièrement impressionnante, entre autres pour sa cathédrale, ici, la place d’armes au grand complet semble être un musée vivant.  En se couchant le soir, moi et Christine, on est plutôt émerveillés par ce que l’on a vu, et encore plus par l’attitude de nos trois gars : ils aiment découvrir les villes !  On croyait un peu que l’on découvrirait dans ce voyage les plages des trois Amériques…  Eh bien, ils semblent être heureux d’avoir quitté la côte, d’être dans les montagnes et de se promener en ville!   Décidément, ils nous ont bien eus…


Prochain arrêt dans le Michoacan, à Quiroga, où l’on se trouve une autre place avec fontaine où l’on réussit à se stationner.  On retrouve ce que l’on connaissait des Amériques: les femmes avec jupes craquées, tabliers, châles, les gens qui déjeunent dehors à dix heures du matin (ici, le coke remplace le mate de coka des peuples andins) le bruit, les popotes sur tous les coins de rues, les marchés plus que chaotiques, on se sent en terrain connu.  La région est la place de l’artisanat, la poterie de Quiroga est sublime  et si on ne s’en achète pas, c’est qu’on sait que dans un camion pendant un an, elle ne survivra pas...

Arrêt ensuite à Patzcuaro, on réussit à se stationner en plein centro, place Saint-François d’Assise. La ville est superbe, la place centrale magique.  Les maisons sont toutes blanches, les toits en terre cuite.  Marcher dans la ville est la principale activité, on se croit encore une fois dans un musée.    Le marché est chaotique à souhait, on y achète trois poissons pour le souper à 70 cents chacun !  Les garçons sont morts de rire car les poissons sont vivants et grouillent sur le présentoir.  Le matin suivant, surprise !  Les pick-up et camions de livraison ont envahi la place où l’on a dormi bien peinards. On réussira à sortir, Christine au volant et moi dehors lui criant quoi faire : on réussit à passer avec à peu près deux centimètres de jeu à droite et à gauche : décidément, on apprend et on s’améliore !

Patzcuaro


Achat de poissons (vivants) au marché



Puis Morelia.  Ville universitaire très importante qui se déclare aussi berceau de la révolution mexicaine.  On ne refait pas la même gaffe qu’à Guadalajara, on repère une grosse rue sur laquelle on est sûr qu’il y aura des autobus et on s’éloigne le plus possible du centro.  On se stationne au zoo pour la nuit, zoo qu’on visitera en passant.  Faut croire que c’est ça un voyage avec des enfants : aller au Mexique pour visiter un zoo ! (ou pour manger dans un buffet chinois, à Guadalajara).  Le lendemain, notre nouvelle technique est payante, un collectivo nous mène au centro en moins de deux.  Les collectivo sont ici des mini-fourgonnettes dans lesquelles on entasse une dizaine de personnes à qui on charge 6 pesos (50 cents) pour le trajet. Les enfants n’ont pas arrêté de parler de papy car Élias a vu un Sprinter qui était un collectivo (même si la plupart sont des Nissan !).  La ville de Morelia est sans doute la plus belle que j’ai vu depuis longtemps.  Elle n’est pas patrimoine mondial de l’Unesco par hasard.  Quand je vois le mal qu’ils se donnent à préserver et conserver leur pierres vieilles de 400 ans, je ne peux m’empêcher de me demander qui est sous-développé? quand je pense qu’on scrappe les maisons bicentenaires au Québec pour construire des centres  d’achats…  Et en me promenant dans les rues, voyant cette ville jeune active, moderne et à la fois fière de ses racines révolutionnaires, je me dis qu’on méconnaît grandement le Mexique.  Pour nous, ce n’est souvent que l’image des Sancho ou Pancho dormant sous son sombrero comme dans Lucky Luke,  adossés à un cactus qui nous apparaît.  Le Mexique est aussi une terre de culture, ce que l’on découvre depuis une semaine et chacun de nous, à sa manière, est émerveillé.  Morelia n’est que le point culminant de ce que nous voyons dans le Mexique colonial depuis une semaine.  Je me surprends même à avouer à Christine, presque gêné, qu’il me serait plus facile de vivre ici à Morelia que n’importe où ailleurs aux Etats-Unis.  Sa réponse :  c’est évident; m’a fait sourire…  Elle est comme Théo : ils sentent plus les choses que moi…




Petite pause sur la place de Morelia





Passage ensuite à santa Clara del cobre où la spécialité est le cuivre. Enfin on peut acheter quelque chose qui ne cassera pas !  Ici on ne parle  plus d’artisanat mais de véritables œuvres  d’art.  Mais malgré tout, il pleut à chaque jour, et la saison des pluies, même dans les montagne, est pluvieuse (pléonasme volontaire).  On en a un peu marre et on décide de se rediriger vers la côte.  Arrêt à Uruapan: on n’a ni gaz et presque plus rien à manger.  Cette ville est la plus chaotique que j’ai vu.  Seuls deux minces accès aux autoroutes qui donnent accès aux villes avoisinantes,  sans parler des rues étroites: deux voies dans deux sens, et des gens stationnés !  alors  le premier qui s’engage décide que c’est un sens unique de son bord, celui dans l’autre sens doit soit trouver un endroit pour se stationner, soit reculer, quand d’autres voitures lui collent au c…  J’en serai quitte pour sortir dans un pied d’eau (la pluie tombe toujours !) à faire sortir Bertha de faux sens uniques avec Christine au volant qui tente de ne pas écouter ce que tous les autres passants et automobilistes lui crient !  Pour couronner le tout, un rassemblement politique a fermé les rues de tout le Centro, pas de chance.  On réussira à sortir après plus d’une heure de tournage en rond, où l’on reprend finalement la route qui nous mène à la côte.  La route est épouvantable, Bertha souffre, les enfants et les conducteurs aussi, mais on s’en sort.  Arrêt à sept heures à Playa azul, à quelques minutes de la noirceur, nous qui nous étions promis de ne jamais rouler de nuit au Mexique.  On est tous des champions, et en prime, nous avons droit à la mer et à un coucher de soleil sur le Pacifique.

Sur la route, entre Playa azul et Zihuatanejo, un gueling guelang m’alerte.   Je m’arrête.
Mer… (pour ne pas dire Tabarn !!!) plus de tink d’eaux usées. Ma réparation-maison n’a pas tenu le coup, faut dire que le réservoir était plein et les cahos épouvantables, mais là n’est pas la question, on est encore amputés…  Et c’est un peu moins drôle que la première fois : les nombreuses autos sur la route me font craindre le pire :  si notre tink est crevée, on est dans la merde.  Littéralement.  On la retrouve dans un fossé après une heure de recherche. Ça prendra un soudeur…  Et il faut faire vérifier les freins de Bertha qui chantent douloureusement depuis la descente de Uruapan à Playa Azul.  Aux grands mots les grands remèdes, avant que notre monture ne devienne une scrapp ambulante, faut agir.  On s’écrasera donc peinards dans un tout inclus pour QUATRE NUITS à Ixtapa, le temps de réparer Bertha, et de recharger nos batteries (au sens figuré)… Vous trouvez que quatre nuits c’est excessivement long ?  C’est que les Mexicains ne sont pas vite vite… voici des jolis exemples : dans un resto sur le bord de la mer, on commande à midi quinze et on est servi à… deux heures trente !  Autre exemple: en arrivant à l’hôtel, on demande un lit de bébé, il est trois heures, après être allés voir la préposée cinq fois, nous avons notre lit de bébé à … neuf heures. On aurait voulu rester deux nuits dans notre tout inclus, puis on a dû rallonger notre séjour pour une nuit supplémentaire, puis on a dû encore rallonger notre séjour pour une quatrième nuit pour que Bertha soit prête à reprendre la route.  Mais bon, le bon côté, c’est la vie de galérien  dans un tout inclus, la piscine, les drink, les jugo de pina à volonté. Les gars n’ont en principe le droit de boire du jus qu’aux repas, mais comme c’est un tout inclus, on leur a fait comprendre que s’il voulait du jus, il devait aller le commander eux-mêmes au bar…  Vous devriez voir Élias et Théo commander des jugo de pina au bar de la piscine, c’est assez tordant. (vous devinerez qu’ils ont laisser tomber l’idée de boire du jus d’orange (jugo de naranja), ça prend un palais solide pour le prononcer, vous en parlerez à Jean-Yves et Ginette).  















Nous avons eu la chance, à notre arrivée, de participer à la libération de bébés tortues dans l'océan.  Les employés de l'hôtel avait récupéré les oeufs d'une tortue venue pondre sur la plage et une fois les oeufs éclos, ils nous ont invité à mettre les bébés tortues sur la plage pour qu'elle rejoignent l'océan.  Magnifique spectacle que nous avons tous apprécié.










Bref, après quatre jours de farniente pour nos trois... pour nous un peu moins... et des réparations sur Bertha, on est prêt à repartir.

Et pour la confiture et la culture, vous devez savoir que je préfère le beurre de pinottes, mais une bonne confiture, une fois de temps en temps…  C’est comme la culture…  Dominique Meunier (qui doit rire dans sa barbe (au sens figuré)) pourrait vous expliquer comment du haut de ma sagesse de mes 24 ans, je décrétais tout haut tout fort que je n’étais pas vieilles pierres…  Eh bien mille pardons à Do, je le suis peut-être plus que je ne le pensais, c’est comme la confiture et le beurre de pinottes.


En passant, vous savez c’est quoi le dernier mot d’Ariel ?  Bo-boy, ça veut dire cow-boy et ça signifie qu’il veut qu’on lui mette son chapeau de paille…