mardi 28 février 2012

L'Équateur, première partie

C’est tout mouillés qu’on s’est dirigés vers l’Équateur en espérant laisser la pluie du côté Colombien.  On n’a pas réussi à se débarrasser de la pluie, mais la douane fut tout de même traversée en une heure quinze minutes !  Ce qui est un record absolu si on exclut la douane pour entrer aux Etats-Unis, ce qui ne compte pas vraiment.   On s’arrête à Tulcan, où l’on pouvait trouver, aux dires du douanier, des cartes routières à l’information touristique.  Lorsque je demande à la préposée, elle me regarde comme si elle comprenait vaguement ce dont je parlais…  Je lui explique en long et en large que je suis un touriste (facile à deviner !) qui voyage avec son propre véhicule et qui aimerait bien avoir une carte pour savoir où il va.  Elle me comprend finalement et me dit que je suis à la bonne place mais qu’elle n’a aucune carte en ce moment, que ça fait un bon bout de temps qu’elle en a reçu et qu’elle ne sait pas quand elle en recevra de nouvelles, bientôt, peut-être…  On en est quitte pour manger au resto à Tulcan pour un grand total de 10 dollars…  et en passant devant une station d’essence on voit que le prix est de 1,48… le gallon !  Bref, l’Équateur s’annonce bien.

On traverse la région de Carchi.  Les montagnes que l’on a quitté en Colombie grossissent à vue d’œil, si les Andes colombiennes étaient certes impressionnantes, ici elles sont carrément majestueuses !  Et ces montagnes sont cultivées à un point tel qu’on dirait qu’une longue courtepointe s’est étendue sur les Andes, pas un recoin de montagne n’est laissé à l’abandon, tout est cultivé.  L’effet est renversant…

On arrête le soir à Ibarra, ville dont on ne dit absolument rien dans les guides de voyage mais qui s’avèrent être une superbe ville coloniale aux nombreux parcs ombragés.  Et malgré la grosseur de la ville, l’ambiance est décidément décontractée.  On se rend compte que les Équatoriens y sont pour beaucoup dans cette ambiance.  Autant nous avions aimé le côté chaleureux et empressé des Colombiens, autant leur tendance au bruit nous avait épuisés…  On en était même venus à éviter les villes, car il était pratiquement impossible de s’y stationner sans en être quitte pour une bonne heure de social, lorsque nous étions chanceux…  Les Équatoriens parlent plus bas (entendre crient moins), sont moins empressés, sans être moins curieux ou souriants…

On se dirigera ensuite vers la Laguna Cuicocha, lac dans le cratère du Volcan du même nom…  La montée pour s’y rendre vaudra à elle seule le détour : difficile de se sentir davantage dans le nuage. Mais cinq minutes après l’arrivée, le nuage se dissipe et laisse apparaître le superbe lac,  les trois hommes les plus âgés (ce qui veut dire que maman n’a pas permis à Ariel de se baigner !) ne résisteront pas à la tentation de faire une petite trempette…  se baigner à 3500 mètres d’altitude, dans le cratère d’un volcan, même si c’est un brin frette…  c’est pittoresque !  Disons que le chauffage dans Bertha a contribué à persuader la représentante féminine de la famille de nous laisser se tirer à l’eau.

Le lendemain matin, on entreprend ce qu’on nous avait dit être une petite marche autour du cratère (10 kilomètres, c’est envisageable en  trois heures).  On part en plein nuage et vers les dix heures, le nuage disparaît pour faire place à un soleil de plomb.  La vue est hallucinante, d’un côté le cratère et l’autre la vallée, dans cette végétation rare qu’ils appellent páramo.  Seul hic, lorsqu’on monte assez haut sur un pic, on voit vraiment tout le chemin qu’il reste à faire… oups.  Impossible qu’il nous reste tant de chemin à faire…  c’est épeurant…  à évaluer à coup d’œil, il nous resterait 8 km à faire et on marcherait à moins de deux km heure…  Quelqu’un s’est décidément fourvoyé en estimant les distances…  On en est quitte pour rebrousser chemin.  Théo, qui déjà n’était pas dans sa bonne journée, crie hurle, piaffe, mord, se roule par terre, il prend ça comme un échec personnel,  On a beau dire qu’on a rien a manger et qu’il est onze heures trente, rien n’y fait.  Bref papa en sera quitte pour faire une bonne partie du retour avec un Théo sur les épaules en plus du sac à dos.  Élias, quant à lui, est dans sa bonne journée.  Il court tant en montant qu’en descendant durant la dizaine de kilomètres que durera notre randonnée.   Décidément, les randonnées se suivent et ne se ressemblent guère !  Après la randonnée de la Laguna verde où il nous a fallu tout notre petit change pour convaincre Élias de marcher, maintenant c’est lui qui nous tire vers l’avant ! Faut croire que la randonnée, c’est entre les deux oreilles que ça se passe !


Au retour on rencontre des jeunes et beaux athlètes de vingt ans qui nous disent que ça leur a pris quatre heures faire tout le tour du cratère…  Ça nous confirme ce qu’on pensait : quelqu’un s’est décidément fourvoyé en comptant les kilomètres, les dix kilomètres devaient être quinze sinon dix-huit kilomètres…   Mais bon, il reste que cette marche autour du cratère valait plus que le déplacement, même si au niveau de la précision, c’est un peu broche à foin, à l’image de l’Équateur quoi !

On se dirige ensuite vers Otavalo, le plus grand et surtout le plus populaire des marchés de l’Équateur.  On était dû pour un petit changement de saison :  mitaines, tuques, bottes de pluie, veste de laine sont maintenant indispensables.  On s’est donc refait un nouveau look : après les maillots de bain, les tuques…  Et pour ce qui est d’Otavalo, même pour des gens qui ont déjà couru les marchés au Guatemala, Otavalo est renversant.  On pourrait facilement évaluer un carré de dix coins de rue par dix coins de rue qui ne sont que marchandes. C’est le bordel total et franchement, ça vaut le déplacement…  Pour les amis montréalais, il faudrait imaginer que des rues Jarry à Jean-Talon et de Saint-Denis à Saint-Laurent,  les marchands se succèdent et ont non seulement investi les trottoirs mais aussi les rues !  Ça donne une idée…

On passera ensuite finalement au mythique mitad del mundo (la moitié du monde)  c’est tout de même un passage obligé en Équateur !  Et nous voilà enfin dans l’hémisphère sud.  (Je dois dire que je n’ai pas remarqué si l’eau tourne à l’envers mais si quelqu’un dans l’hémisphère Nord veut bien me dire ça tourne de quel bord au Canada, je pourrai vous dire si ça tourne désormais à l’envers pour nous.)

Jean-François, Théo et Ariel, un pied dans chaque hémisphère...


Et une fois mieux habillés, on pourra finalement se diriger vers Cotopaxi, volcan de quelque 5900 mètres (n’ayez peur nous ne sommes pas montés jusqu’au sommet !)  On dormira néanmoins dans un merveilleux bivouac à 3800 mètres, à la limite des arbres et du páramo, sous les pins rouges, sur les pentes du volcan Cotopaxi.  On se promènera le lendemain dans une ancienne vallée glacière, faisant le tour de la laguna limpiopungo.  L’air est rare  et froid  et le paysage est à couper le souffle.  C’est drôle, le paysage est davantage ce à quoi on s’attendrait de paysages de l’Alaska, plutôt que de l’équateur.  C’est là qu’on fêtera les deux fêtés de la famille du six février, Théo a quatre ans et papa 32 ans.  On se paiera même un feu de camp (même si je me suis obstiné pendant deux heures à souffler sur du bois mouillé pour avoir le plaisir de veiller autour du feu le soir de mes 32 ans !) et des cerfs viendront nous tenir compagnie à l’heure du souper !  Bref, Cotopaxi est certainement un des très beaux bivouacs depuis longtemps !
Nos deux fêtés du 6 février
On redescend ensuite pour aller chercher Ginette, la mère de Christine, qui arrive à Quito.  Si vous voulez le savoir, Quito est l’un des derniers endroits où vous voudriez aller en voiture. À l’aéroport en particulier :  on ne peut imaginer plus au centre-ville.  La ville est  sise entre des pics de 4000 mètres et s’étend sur des collines, et encore des collines.  On dit qu’elle est à 2800 mètres, mais ça, c’est au fond de la vallée.  La promenade en ville se déroule tout de même assez bien jusqu’à l’aéroport.  On y accueille Mamie avec des larmes de la part de la gent féminine, les hommes se retiennent, Ariel semble un peu déboussolé : on lui avait dit qu’elle arrivait en avion et elle est arrivée à pied, en traversant une grande porte vitrée, mais bon, comme dirait ma mère, il s’en remettra.  Après, c’est sans doute l’effervescence du moment, mais dans un excès de confiance, on décide de s’éloigner le plus possible du centre pour sauver cette traversée le lendemain en pleine heure de pointe…  mauvaise idée…  Avez-vous déjà remarqué qu’on n’indique jamais les courbes de niveaux sur une carte routière ?  Bref on avait « spotté », un super parc, tout près de la voie qui nous permettrait de sortir de Quito le lendemain, mais ce que la carte ne disait pas, c’est que ledit parc était sur les bords d’un précipice, et que pour s’y rendre, nous avions entrepris de grimper le précipice en question (et quand je dis précipice, j’exagère à peine !).  Bref, après plusieurs sens uniques on se ramasse dans des rues toutes plus étroites les unes que les autres, à la noirceur, et… on se rend compte qu’on sera obligé de redescendre…  (et il faut savoir qu’avec notre Bertha de cinq tonnes les descentes sont toujours plus éprouvantes que les montées)  C’est à ce moment que deux gentils policiers nous abordent en semblant penser : qu’est-ce que vous foutez là bande de triples idiots, vous rendez-vous pas compte que vous êtes un véritable danger pour vous-même et pour la communauté ?  En fait je suis bien heureux qu’ils l’aient juste pensé, parce que j’aurais bien été obligé d’acquiescer à tout cela s’ils l’avaient seulement formulé… Mais bon, Christine a pris les choses en main, elle qui commence à être drôlement efficace avec la gent masculine (les mécanos exceptés), et leur  explique qu’on était perdu, et qu’on voulait se rendre au Parc métropolitain.  Ils se sont regardés en pensant : « ce qu’ils peuvent être tarés les gringos ! ».  Puis un premier s’est mis à nous expliquer le chemin, alors le second lui a sacré un bon coup de coude en le regardant du genre : « Sois donc pas plus tarés qu’eux, tu vois pas qu’ils sont perdus ! ».  Bref, ils ont jasé un brin pendant qu’on attendait et ils nous ont finalement amenés dans le stationnement d’un poste de police, en haut de la ville…  le lendemain, on s’est rendu compte que le poste de police était un poste de police montée, on a donc pratiquement couché dans l’écurie, au grand bonheur d’Ariel qui a pu aller voir et revoir les chevaux, mais à son grand désespoir quand il a fallu partir ! Bref, mamie a eu un beau baptême de l’air en Bertha :  perdus la nuit dans une capitale sud-américaine bordélique à bord d’un monstre de cinq tonnes dans des rues trop étroites ! 
Les garçons sont heureux de retrouver leur mamie
 On fera une grosse journée de route le lendemain pour se rendre à Saquisili, où il y a le lendemain un marché qui rivalise d’importance, quoique moins touristique, avec celui d’Otavalo.  En fait, une des principales raisons pour laquelle on y allait, c’était pour sauver notre peau…  En effet, à Otavalo, on avait promis à nos enfants un marché d’animaux, mais comme ils étaient tout nus dans’rue (du moins pas du tout habillés pour les Andes où il  fait mauditement frette), et que nous sommes des parents responsables, nous avions jugé prioritaire d’habiller nos enfants à Otavalo…  Grand mal nous en pris, nous faillîmes bien près d’être cloués au pilori, alors nous leur promîmes un autre marché d’animaux.  Et franchement, le marché d’animaux de Saquisili fut à la hauteur de nos espérances :  poules, cochons, vaches, lamas, cochons d’Inde, poussins, moutons, alpacas, cochons, la totale.



Nous avions prévu qu’une fois le marché terminé (le marché c’est toujours le matin), nous roulerions l’après-midi jusqu’au Volcan Quilatoa, qui, paraît-il, a une lagune d’un vert émeraude à couper le souffle.  Mais bon, nous allions découvrir ce qu’est pour vrai l’Équateur, nous nous sommes trompés trois fois de chemin avant de trouver le bon, et évidemment des réparations monstres nous empêchaient d’avancer…  À cinq heures, au volant, je me rends bien compte qu’il serait décidément stupide de poursuivre jusqu’au Quilotoa le soir même et à la première indication, au trois quarts effacée, je prends le chemin de terre qui descend vers Tiga, une minuscule ville qui est dans une vallée où coule une rivière.  Le chemin de terre est juste assez psychopathe pour laisser passer Bertha et c’est plutôt silencieux dans Bertha alors que j’essaie d’avoir l’air au-dessus de mes affaires (c’est beau l’orgueil mâle tout de même !).  Finalement on s’arrête dans une ferme, qui offre aussi le gîte  (dont Ginette bénéficiera) et le repas (dont nous bénéficierons tous). Bertha est stationnée sur les rives de la rivière, on est entourés de moutons, d’alpacas, de lamas, de vaches, de moutons, de canards…  Si nous ne sommes pas au paradis, décidément, nous n’en sommes pas très loin cette fois-ci.  Comble du bonheur, trois jeunes enfants indigènes habitent aussi la ferme et viennent jouer avec les nôtres, c’est vraiment la fête pour nos trois mousses. 
Les deux équipes de jaugent...
Le lendemain, après avoir fait plus ample connaissance avec tous les animaux de la ferme (Théo s’est même permis un petit tour à dos de lama !), on se dirige vers la laguna Quilotoa…  On est en plein nuage lorsqu’on y arrive, alors, le vert émeraude, ça ne sera pas pour tout de suite…  En fin d’après-midi, on  profite d’une éclaircie pour se balader autour du volcan et oui, la laguna est très belle (bien que pour faire mon difficile, son vert ne vaut pas le vert du Volcan Azufral de la Colombie).  Le lendemain, on profite du beau temps pour descendre au fond du cratère, et quelques touristes plus dingues que nous  s’y baignent (ou peut-être veulent-ils seulement épater la galerie ? Ils sont  en effet toujours entourés de jolies nanas qui prennent des photos en riant et roucoulant).  Toujours est-il que cette fois-ci, on ne s’y baignera pas.  Mais…  car il y a un mais, on fera un tour de bateau sur la laguna.  Après avoir tourné en rond pendant une quinzaine de minutes et avoir reçu un bon spectacle d’Ariel à la rame (qu’il appelait d’ailleurs pelle !), on remonte.  La montée est vraiment épouvantable et on pense tous y laisser une partie de nos poumons, sauf Élias qui a monté toute la dernière moitié à la course et même terminé avec des touristes Argentins, ses parents étant trop lents  (faut dire que la moitié de la délégation parentale devait motiver et tirer Théo et l’autre porter Ariel…).
Tour de bateau sur la lagune
Jeunes filles indigènes
Élias et mamie en nacelle 
Notre prochain arrêt se fera sous des altitudes plus clémentes (le dodo à Quilatoa était tout de même à 3900 mètres !) : on se dirige vers Banos (toilette ! fait dire Élias, qui l’a d’ailleurs trouvée  bien bonne !).  Il y fait plus chaud, c’est plus ensoleillé, c’est un peu gringoland (nous voyons plus de touristes ici que nous en avons vu en deux semaines d’Équateur), mais tout de même sympathique, et il y a des bons restos (ce dont on profitera puisqu’exceptionnellement on bénéficie d’une gardienne ! gros merci Ginette).  Le bout du bout, c’est qu’on dort aux côtés d’un énorme parc pour enfants, et les enfants s’occupent presque seuls !  C’est presque les vacances quoi !Les journées y passent entre un tour de Chiva (genre de camion-autobus où sur la plateforme sont  mis bancs et toit mais sans murs, un classique sud-américain.  Ne pas faire de tour de Chiva, c’est comme pour un touriste aller au Canada sans voir les chutes Niagara, bon d’accord, vous pouvez tous me traiter de kétaine, j’y suis allé ! mais pas dans ce voyage).  En Chiva donc, on a fait le tour des chutes de la région, on descend à travers des canyons en téléphériques, franchement, ça vaut le coup !  On profitera de notre arrêt à Banos pour faire un tour de cheval et bien sûr, on ira aussi se faire macérer dans ses réputés bains termaux (eh oui, banos ne veut pas seulement dire toilette, mais aussi bain !).
Théo aime toujours autant monter à cheval
Chouette baignade dans les environs de Banos

























On continuera notre parenthèse de chaleur équatorienne (tout est relatif) en descendant vers la jungle et Puyo.  Premier constat : Puyo est une ville très laide, alors nous plions bagage et partons pour Veracruz (10 kilomètres plus loin).  On s’arrête dans un balnéario (genre de piscine naturelle alimentée par une rivière).  Les digues sont ouvertes et le balnéario n’a que quelques centimètres d’eau.  L’employé nous explique qu’à cette période-ci de l’année, il pleut trop et si les digues étaient fermées l’eau serait brune de boue et peu invitante…  On y reste tout de même.  Le soir, il se met à tomber des cordes et en vingt minutes, le niveau de la rivière monte de près d’un mètre et demi !  Le spectacle est époustouflant et je crois maintenant ce que j’avais lu, soit que l’amazone peut avoir des crues de cinq à huit mètres !  Le lendemain, on se rend au centro de rescate los monos, où ils recueillent des animaux de la jungle trouvés ou blessés.  On s’en donnera à cœur joie avec les singes laineux, les singes araignés, les ardillos, les capucins, les coatis et même une loutre.  Ces animaux, ni tout à fait sauvages ni tout à fiat domestiqués  se laissent caresser!  
Scènes surprenantes au refuges Los Monos

Notre dernier arrêt dans la jungle sera au jardin las orchideas, qui est beaucoup plus qu’un seul jardin d’orchidées…   Il y a trente ans, quelques illuminés amants de la nature ont acheté des terres qui servaient au pâturage. Les terres étaient pratiquement stériles, étant donné qu’en Amazonie, la partie fertile du sol ne mesure que trente centimètres d’épais (chez-nous au Québec, c’est plus d’un mètre par endroits !)  Alors, pendant vingt ans, ils ont épandu du fumier…  Et au bout de vingt ans, ils se sont mis à planter des arbres et des fleurs mais en sélectionnant rigoureusement les espèces,  en veillant à avoir la plus grande diversité possible…  Et savez-vous le plus beau dans tout ça ?  S’il y a vingt ans il n’y avait que des sauterelles, depuis, les papillons, les araignées, les scarabées, les grenouilles, les serpents, des iguanes, plus de cinquante sortes d’oiseaux, des singes, des chauves-souris, des paresseux sont revenus… Bref, ceux qui pensaient que l’homme qui plantait des arbres (clin d’œil à David) n’était qu’une fable, eh bien, c’est faux…
Élias avec une fleur dans la bouche
Mais la saison des pluies dans l’Amazonie étant particulièrement mouillée, on ne sent pas le besoin de s’y attarder outre mesure, et on plie donc bagages pour Chimborazo, le plus haut Volcan de l’Équateur, à 6319 mètres. Et pour ceux qui aiment les stats, c’est aussi le point le plus éloigné du centre de la terre (la terre étant aplatie aux pôles !).  Bref après Bertha en Amazonie, Bertha dans la neige !

Mais vous devrez attendre encore un peu pour voir nos photos sous la neige…

À bientôt chers lecteurs… 

mardi 7 février 2012

La Colombie du nord au sud

Ce matin là, le 12 janvier, on quittait donc la côte caraïbe.  On a alors commencé notre longue route vers San Gil…  Après une journée complète de route, à rouler presque exclusivement dans une plaine aride et étouffante, on dort à Agua chica après plus de 400 km.  Franchement, si c’est loin de nos scores du Canada ou des Etats-Unis, ce 400 km est excellent pour l’Amérique latine !  Le lendemain, on entre véritablement dans les Andes, avec en prime la plus mauvaise route depuis le début du voyage, tout est en réparation, ou défoncé, des camions et encore des camions… En quatre heures de route, on ne fait que 100 km.  Si c’est le rythme en Amérique du Sud, nous n’arriverons pas au Brésil avant 2015 !  Mais bon faut être optimiste !  L’après-midi se passe à suivre des camions tous plus lents les uns que les autres : les plus lents roulent à 15 km heure !  À ce rythme nos freins ne peuvent pas survivre, ils surchauffent et avant de se ramasser dans le décor, on doit s’arrêter : deux heures de pause.  On arrivera finalement à San Gil avec la noirceur… encore une fois grosse journée !

Nos enfants aimeront bien  San Gil dont les trottoirs sont en escalier tellement certaines rues sont à pic.  La ville a un charme certain, mais c’est jour de marché et un bordel total règne dans le centro.  Je rentre à la hâte avec Ariel, endormi en poussette et Théo, sur le bord de la crise de nerfs, jusqu’à Bertha, en laissant les quatre autres s’occuper du marché.  Ils réussissent à trouver presque tout dans ce joli bordel, et c’est les bras chargés qu’ils me rejoignent à Bertha.  L’après-midi se passera dans la piscine de notre hôtel.  Lorsque le soleil sort, ça tape, on se rapproche de l’Équateur et ça paraît.

Le lendemain matin, détour vers Barichara, peut-être parmi les plus belles villes visitées jusqu’ici.  La ville entière est peinturée de blanc, les rues en pierre, les balcons en bois, et le bleu du ciel à 2000 mètres d’altitude sous le soleil de l’Équateur… c’est un effet bœuf.  Pour peu cette ville sortirait d’un conte de fée, ou d’un film colonial.  




La matinée passe vite et on se sauve vers Pozo Azul pour dîner et surtout se baigner dans ses cascades : le soleil de midi est vraiment écrasant.  Nos trois gars font une belle démonstration à leurs grands parents  de leur habileté à marcher sur les roches mouillées, et les Colombiens, en voyant Ariel faire un saut de plus d’un mètre et demi, d’un rocher au bassin, semblent être convaincus d’avoir rencontrer les parents les plus innocents au monde.  Mais bon, personnellement, je suis bien fier de lui…

Le lendemain, on se dirige vers Villa de Leyva, encore une fois les paysages des Andes sont impressionnants, nous roulons par moment à plus de trois mille mètres, record du voyage (pour l’instant) avant de redescendre vers Villa de Leyva, autre superbe ville coloniale, où le temps semble s’y être arrêté, le rythme est lent et les voitures rares.  Le lendemain, on loue des chevaux et découvrons la vallée à cheval, et Élias, tout comme Théo avant lui, monte seul à cheval !  Bravo mon grand !
Ariel à Villa de Leyva avec ses grands-parents adorés

Petite baignade pour Théo et Jean-François au milieu de notre balade à cheval
Le jour suivant, on va faire une petite randonnée que notre guide avait dit tranquille… et qui s’avère être dangereusement casse-cou.  Dans certains tronçons il faut se hisser ou se laisser descendre en s’agrippant à une corde !  Les deux grands sont enchantés !  Enfin un parc grandeur nature.  Ce n’est pas à proprement parler une ballade de détente, mais par chance, la ballade est courte, et cette fois-ci, au moins, il ne pleut pas !



Dernier arrêt de la visite de mes parents (Gaston et Micheline), Bogotà.  Pour tous ceux qui croient que l’Amérique du Sud, ce n’est que les lamas, les femmes avec les enfants sur leur dos, les ponchos et tutti quanti, Bogotà est tout sauf ça.  Bogotà, c’est huit millions  d’habitants (plus que tout le Québec réuni !), c’est moderne, jeune, branché et tout le charme colonial de la vieille ville est préservé.  



Pour l’occasion on a remisé Bertha dans un stationnement et loué deux appartements pour trois jours…  On ne le regrette pas ! Ici ce ne sont pas des voies  qui sont réservées pour des autobus, mais des rues entières !  Les sens uniques changent selon les jours  de la semaine et les voitures ont le droit de circuler un jour sur deux selon le dernier chiffre de leur plaque d’immatriculation.  Toutes solutions qui paraîtraient à nous Québécois draconiennes, mais qui ont réussi à faire d’une mégapole de huit millions d’habitants un lieu plus que convivial. Le dimanche les deux rues principales du centre-ville sont fermées aux automobiles et les cyclistes s’en donnent à cœur joie.  Et nous aussi bien sûr !   C’est comme si à chaque semaine , à Montréal, Ste-Catherine et St-Denis étaient fermées aux automobilistes !  On se paiera aussi le luxe d’une montée en téléphérique au-dessus de la ville.  Le Cerro de Monserrate est à 3200 mètres.  La vue est à couper le souffle. Les trois jours passés ici filent comme l’éclair, et déjà grand-papa et grand-maman repartent…  Évidemment tout le monde pleure, c’est toujours intense de laisser ceux qu’on aime surtout lorsqu’on sait qu’on ne les reverra pas d’ici sept mois…  C’est particulièrement difficile pour Élias et Théo, qui eux, ne peuvent pas écrire pour donner des nouvelles… six mois, c’est long.
La famille admire Bogota du haut du Cerro de Monserrate
Après avoir séché nos larmes, on repart quand même vers la vallée du café.  On part néanmoins tard de Bogotà et la sortie de la ville est plutôt longue (est-ce vraiment une surprise ?)   On passera en plus une partie de l’après-midi à chercher quelqu’un qui pourrait nous remplir en propane, mais ce n’est pas si simple…  On trouve finalement un distributeur qui remplit les camions et les bombonnes et on croit que le tour est joué…  malheureusement non.  On me dit que c’est la loi (j’haïs-tu ça c’te réponse-là, c’est la loi !) on ne peut distribuer à des particuliers, seulement à des compagnies (bordel, j’aurais dû m’enregistrer comme compagnie avant de partir, Bertha et cie, ça sonne bien)…  Toujours est-il qu’on est à la veille de ne plus avoir de propane,  et le propane est pratiquement plus vital que l’essence : le propane, c’est la cuisine, le frigidaire et le chauffage (n’oublions pas que nous entrons dans les Andes !).   Je décide donc de déléguer ma chère promise pour le lendemain, je me dis que ses charmes féminins, surtout avec des enfants dans les bras, ont déjà fait leur preuves avec  les latinos, alors sûrement elle m’aura du propane le lendemain.  On dormira dans le parque écologico de Chinauta, c’est affreusement cher mais il y a une piscine et une ferme à visiter, alors les enfants sont heureux.

Le lendemain Christine part pour user de ses charmes afin de soudoyer un employé de l’usine de gaz, mais à ma grande surprise, elle revient bredouille.  Je suis plutôt surpris, l’Amérique du sud n’est donc pas l’Amérique centrale…  mais bon, elle me dit que tous les hommes présents se sont rués sur leur cellulaire pour trouver un collègue chauffeur de camion qui pourrait venir nous remplir sur place…  Il doit venir à dix heures trente, on attend, et attend… il arrivera à midi trente (finalement l’Amérique du sud a certains points en commun avec l’Amérique centrale).  Finalement le charme a opéré, la réaction est un peu moins directe qu’en Amérique centrale, mais ça fonctionne toujours…

On s’attaque ensuite à la Cordillera central (une des trois ramifications des Andes en Colombie), qu’on monte et descend pour dormir à Arménia.  Tout ça sous la pluie…  Le lendemain on se pousse vers Salento (qui lui aussi semble sorti d’un conte de fées : maisons blanches aux balcons peinturés de verts, roses ou bleus, entourées de collines vertes de café, à 2000 mètres d’altitude) Franchement, j’ai l’impression de me répéter quand je parle de la beauté des villages colombiens…  





On visitera à cheval la vallée de Corcora , superbe avec ses plus hauts palmiers au monde (jusqu'à 60 m !), ses champs, ses vaches et bien sûr ses montagnes.  



On visite aussi une plantation de café, et à ma grande surprise, c’est une réussite pour toute la famille ! Les enfants semblent en pleine chasse aux cocos de pâques, sauf que les œufs ont été remplacés par les grains rouges du café.  On  comprend aussi comment ça se fait qu’on soit passé parmi des pays qui produisent parmi le meilleur café au monde :  Mexico, Guatemala Antigua, Costa Rica, Panama et maintenant Colombie, sans vraiment boire du bon café…  Eh bien, c’est simple, le bon café, ils l’exportent, et sur place ils boivent la seconde classe…  On profitera aussi de la place centrale de Salento, (haut lieu du tourisme colombien ! pour rencontrer Marjolaine, une suisse, Marco et Tina, français  et reporters photo hors de leur pays cinq mois par année, et même en prime, une autre Bertha qui viendra faire pâlir la nôtre par ses magnifiques graffitis…  On recroise aussi Alice et Diego québécois, qu’on liftera le lendemain jusqu’à Cali.


On continue notre petit bonhomme de chemin vers Popayan, où l’on aurait pu vouloir s’attarder (en particulier Christine) mais où l’on ne s’attardera pas…  Comment dire…  Les deux plus vieux avaient décidé qu’ils en avaient soupé des villes et qu’ils en avaient rien à foutre d’une belle ville coloniale, alors, en adultes matures et responsables (et comme ils commençaient d’ailleurs dangereusement à se transformer en monstres (je vous en pris ne faites pas de rapport à la DPJ, même sur la route, des enfants peuvent être des monstres !)), on a pris nos cliques et nos claques  et sacré le camp.  On a descendu dans la vallée de patia et permis à notre progéniture de se défoncer sur leur vélos et dans une piscine (faut dire que ladite vallée est à un peu moins de mille mètres, vraiment très bas, et donc très chaud, pour cette région !).
Papayan, la ville blanche
Le lendemain on s’est rendu vers ce qui semble, à en croire les livres de voyage, la région mal-aimée de la Colombie (Narino), mais pour nous, c’est clairement un coup de cœur !  On dépasse Pasto et dormons sur les flancs du Volcan Gallera, dans le stationnement d’un restaurant où tous les riches de Pasto (la capitale du département) viennent y passer leur dimanche. Et pour cause, leur terrain abrite chevaux, poney, ânes, oies, canards, moutons, chèvres, bref Ariel est aux anges.  Le lendemain on se dirige vers le volcan azufral où paraît-il, la laguna verde, vaut le détour.  On se rend compte à quel point cette région attire peu de touristes…  La route que nous devons emprunter pour nous y rendre nous fait passer par la véritable Colombie rurale…   Des routes sans garde-fous qui donnent sur des canyons de plusieurs centaines de mètres de profond, des villages gros comme ma main, des vaches et chevaux  dans la rue, les ponchos des habitants, tout y est.  Et c’est sans arriver à Tuqerres.  Ville où l’on doit demander son chemin pour arriver au Volcan…  véritable ville de cow-boy, nous sommes des vraies attractions touristiques…  On réussit finalement à savoir où l’on doit aller, mais le chemin pour se rendre au volcan est un véritable chemin de vache (si le mot chemin de vache a déjà voulu dire quelque chose.)…  On réussit même à s’embourber, mais cette fois, on réussit, après vingt minutes de coups de pelles, à se désembourber seuls…    On dormira tout croche à 3650 mètres.  On est un peu inquiet pour la santé générale…  on a tous le souffle court…  Mais le ragoût de lapin  de notre cordon bleu Christine a sans doute fait son œuvre, on passe bien la nuit, personne n’est malade.


Le lendemain, on se lance à la chasse de la laguna verde :  12 kilomètres de marche, entre 3600 et 4050 mètres, avec trois enfants de moins de 6 ans…  C’est un gros défi, on le sait.  Et si ça peut sembler peu si l’on compare statistiquement aux trentaines de kilomètres que nous marchions dans les Andes Christine et moi il y a seulement quelques années, il me semble que l’exploit est plus grand encore… Car Théo a marché comme une machine (pas une seule plainte, il n’a même pas quatre ans !), Élias a marché jusqu’au bout, même s’il était dans une mauvaise journée, comme il l’a lui-même reconnu et Ariel a bien marché, mais surtout bien accepté de marcher sur maman(en porte-bébé), lui qui aime de moins en moins ce moyen de transport. À voir notre Théo si heureux dans la nature, on se dit que décidément, il y a eu trop de villes et pas assez de grands espaces ces derniers jours…  Il nous demandera même après onze kilomètres de marche, s’il pourra jouer dehors au retour à Bertha !
La fierté de notre premier 4000m en famille...
Magnifique lagune verte
Après un dîner rapide dans Bertha, on redescend cette route de misère, avec nous trois anges qui dorment sagement à l’arrière. On se sent les plus chanceux du monde.  On passe notre dernière nuit en Colombie au magnifique sanctuaire de Las Lajas, construit dans un canyon.


Que dire de la Colombie ?  Premièrement qu’il ne faut pas croire ce qu’on en entend par chez nous.  On s’est toujours senti en sécurité, les gens sont accueillants  et sympathiques.  Il y a le soleil la chaleur, parmi les plus belles plages que nous avons vu, les Andes, des villes coloniales.  Franchement, ce pays a énormément a offrir et je ne serais pas surpris que d’ici les prochaines années, il devienne aussi populaire (touristiquement parlant) que l’Argentine, le Guatemala ou le Costa-Rica.  On a adoré.  Maintenant, à nous l’Équateur ! 
Le magnifique sanctuaire de Las Lajas